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SAVOIR ET PERSUADER

Ce projet de recherche s'applique à étudier la relation entre savoir et persuader dans les corpus rhétoriques et philosophiques. L'alternative entre savoir et persuasion est au centre du débat philosophique en Grèce ancienne : à partir de Platon, au IVe siècle av. J.C., on assiste à la naissance d’une tension entre la tradition rhétorique florissante dans la politique athénienne et une conception philosophique et rationaliste de la parole publique. Platon introduit l’idée qu’une nouvelle rhétorique basée sur la connaissance et des procédures rationnelles d’argumentation est possible, une rhétorique qui se distinguerait de la technique rhétorique traditionnelle qui constitue selon lui une persuasion dénuée de savoir. Des conceptions similaires se retrouvent chez Aristote et les Stoïciens. Ces trois écoles de pensée peuvent être rapprochées autour de ce concept de « rhétorique philosophique » qu’ils essaient de définir en opposition au corpus rhétorique naissant. En effet, malgré leurs divergences, ces penseurs cherchent à rapprocher la rhétorique de la dialectique, c’est-à-dire à fonder la rhétorique sur l’argumentation logique. Cette approche détermine ensuite la tradition philosophique de la période hellénistique à l’Antiquité tardive qui cherche à en produire la systématisation autour d’une question : comment produire une parole persuasive sans perdre de vue la vérité ? Comment, lorsqu’il faut convaincre pour déclencher la décision et l’action, ne pas travestir ou déformer la réalité ? Comment distinguer, dans la parole publique, la parole enjôleuse de celle qui cherche sinon à instruire, du moins à éclairer le jugement ? Et comment faire pour qu’elle s’impose au public dans un contexte de pluralisme démocratique ? Notre projet propose de repartir de l’ensemble de ces questions posées par la tradition philosophique pour, d'abord, étudier ce phénomène relativement négligé et ensuite, pour envisager comment un tel débat pourrait éclairer la crise actuelle que traverse le discours public.

Responsables : Vladimir Mikeš (Prague, Department for the Study of Ancient and Medieval Thought), Stéphane Marchand (Paris 1 Panthéon-Sorbonne)

Membres du projet : Pierre Balmond, Anthony Bonnemaison, Vojtěch Linka, Jeanne Ravaute