Savoir et gouverner
Essai sur la science politique platonicienne
La seule source légitime de l’autorité politique est le savoir. Telle est l’une des thèses fondamentales de la pensée politique de Platon. Mais quel savoir l’homme politique doit-il posséder pour gouverner ? Sur qui s’exerce-t-il ? Quelles sont les modalités de son action ? Autant de questions qui occupent le Politique, dialogue où Platon invente la notion de science politique et où il définit non seulement ce qu’elle est, mais ce qu’elle fait, lui assignant par là même, pour la première fois, un rôle prescriptif, à la frontière du théorique et du pratique. Savoir prescriptif et architectonique dont le modèle est l’architecture, soin du troupeau humain sur le modèle du pastorat, production du lien de la cité sur le modèle du tissage : le Politique donne à la science du gouvernement des hommes son statut et sa finalité, ses modèles et ses instruments.
Lecture philosophique suivie du Politique, cet ouvrage entend montrer ce qui fait l’originalité et la profondeur de ce dialogue. Et justifier, du même coup, qu’on le lise à la même hauteur que la République ou les Lois. Car s’il n’y a pas de bonne politique sans un bon politique, quelle influence celui-ci peut-il avoir sur les bipèdes sans plumes que nous sommes, et qui ne sont pas naturellement faits pour vivre ensemble dans une cité ? Platon répond en élaborant du politique une figure nouvelle : celle du royal tisserand, soucieux du tissu social et attentif à le préserver de la moindre déchirure, le principal risque étant l’attraction du semblable par le semblable et la haine de ce qui est différent et étranger. Rien n’est donc plus actuel que ce tissage que la science politique platonicienne cherche à produire, grâce auquel la cité, au delà de ses antagonismes naturels, accède à une harmonie garantie par des valeurs partagées.